Mercredi 28 juin 2017 3 28 /06 /Juin /2017 08:00

"Pastorale américaine" est un somptueux roman de Philip ROTH paru aux USA en 1997 (en France, chez Gallimard en 1999). À travers le destin de Seymour Levov, dit le Suédois, immigré juif à la tête d'une manufacture de gants, il retrace les bouleversements qui ont traversé la société américaine des années 1960 à 1990. Je vous propose 3 extraits du roman

Roth-Philip-Pastorale-Americaine

Extrait n°1 , pages 327-328: Le Suédois a épousé Mary Dawn Dwyer, une jeune femme d'origine irlandaise, ex Miss New Jersey 1949

"Sur l'intensité de ses relations avec sa jeune épouse, il était des plus réservés. En public, ils étaient assez prudes, et personne n'aurait deviné le secret de leur vie sexuelle. Avant Dawn, il n'avait jamais couché  avec une de ses eptites amies. Il avait couché avec deux putains quand il était dans les Marines, mais ça ne comptait pas roth5vraiment ; ce n'est donc qu'après leur mariage qu'ils avaient découvert combien il pouvait être passionné. Il avait une énergie et une endurance phénoménales ; le contraste entre sa petitesse à elle et sa masse à lui, la facilité avec laquelle il la soulevait, son ampleur, quand il était au lit avec elle, semblait les exciter tous les deux. Elle disait que, quand il s'endormait après l'amour, elle avait l'impression de dormir avec une montagne. Elle éprouvait parfois un frisson de plaisir à penser qu'elle dormait auprès d'un roc énorme. Lorsqu'elle était couchée sous lui, il la pilonnait de tout son élan, mais en même temps il se tenait à une certaine distance pour ne pas l'écraser ; et, grâce à son énergie et à sa force, il tenait longtemps sans fatigue. D'un seul bras, il pouvait la soulever et la retourner en levrette, ou l'asseoir sur lui et bouger facilement sous ses quarante-quatre kilos. Des mois durant, après leur mariage, elle se mettait à pleurer dès qu'elle atteignait l'orgasme. Elle jouisaait et elle pleurait ; il ne savait qu'en penser. " Qu'est-ce qu'il y a ? lui demandait-il. — Je ne sais pas. — Je te fais mal ? — Non. Je ne sais pas d'où ça vient. On dirait que c'est le sperme, quand il jaillit en moi, qui déclenche des larmes. — Mais je ne te fais pas mal ?  — Non.  — Ça te plaît, Dawnie, tu aimes ? — J'adore ! C'est quelque chose de spécial. Ça m'atteint là où rien d'autre n'arrive à remonter. À la source des larmes. Tu touches une partie de moi que rien d'autre ne peut toucher.  — Bon. tant que je ne te fais pas mal... — Non, non. C'est étrange, c'est tout. Étrange. Étrange de ne plus être toute seule." Elle ne cessa de pleurer que le jour où il embrassa son sexe pour la première fois. " Tu ne pleures pas, comme ça, dit-il.  — C'est tellement différent. — En quoi ? Pourquoi ?  — Sans doute que... je ne sais pas. Sans doute que je suis de nouveau toute seule. — Tu ne voudras plus que je le fasse ? — Oh si ! dit-elle en riant. Oh, que si ! — Bon. — Mais Seymour, comment as-tu appris ça ? Tu l'avais déjà fait ? — Jamais. — Et pourquoi l'as-tu fait, alors, dis-moi ? "roth6 Mais il ne savait pas expliquer les choses aussi bien qu'elle, de sorte qu'il n'essaya même pas. Il s'était seulement senti pris du désir de faire quelque chose de plus, alors qu'il avait soulevé ses fesses dans sa main, et il avait porté son corps à sa bouche. Pour y plonger son visage et se laisser aller. Aller là où il n'était jamais allé. Ils étaient complices, d'une complicité extatique, lui et Dawn. Bien sûr il n'y avait aucune raison de penser qu'elle lui rendrait un jour la pareille, et puis, un dimanche matin, elle l'avait fait, comme ça. Il n'en revenait pas. Sa petite Dawn lui avait entouré la queue de sa jolie petite bouche. Il en était sidéré. Ils l'étaient tous les deux. C'était un geste tabou pour l'un comme pour l'autre. Et, depuis ce jour-là, ils avaient continué ainsi pendant des années. Ils n'avaient jamais cessé. (...) Lorsqu'elle sortait du lit après l'amour, tout échevelée, les joues en feu, avec son rimmel qui avait coulé, les lèvres meurtries, et qu'elle allait à la salle de bains faire pipi, il la suivait et la soulevait du siège après qu'elle s'était essuyée, pour regarder leur reflet dans la glace. Alors elle était aussi surprise que lui, non pas seulement de voir combien elle était belle, combien la baise l'embellissait, mais, surtout, combien elle était différente. Le masque social était tombé, révélant la vraie Dawn."

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Par michel koppera - Publié dans : lectures x - Communauté : Fantasmes et écriture
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Commentaires

Remarquable et très agréable lecture. Merci
commentaire n° :1 posté par : nicocerise le: 29/06/2017 à 23h16

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