Mardi 28 octobre 2014 2 28 /10 /Oct /2014 08:30

Philippe # 7

 

Voilà cinq jours que je n'ai pas franchi le seuil de sa boutique.

Cela me paraît une éternité maintenant.

Au début tout allait si bien que j'en oubliais presque l'existence de Valentin tant ma vie avait été bouleversée par les changements du quotidien.

chambre7-0Dés le lendemain, estomaqué, j'ai vu Monika se rendre au travail dans une tenue inconcevable quelque temps auparavant.

Lors de ses achats effectués la veille sa garde-robe avait pris un coup de fraîcheur.

Elle vint fièrement me souhaiter une bonne journée vêtue d'un chemisier à l'échancrure plus ouverte que d'habitude, sa gorge était mise en valeur par une parure plongeante, de nouvelles boucles d'oreilles, un maquillage plus seyant et cette mini-jupe, jamais elle n'en avait porté jusqu'à présent, des robes courtes oui, mais de mini-jupe point.

Sans oublier ses escarpins aux talons hauts révélant sa cambrure naturelle, les lanières de cuir étreignant ses mollets semblaient à regret ne pouvoir monter plus haut.

L'imaginer, loin de mon regard mais offerte à d'autres la journée durant me vit vaciller de bonheur.

Même si je nourrissais quelques regrets, il me fallait accepter cette clause du contrat, n'avais-je pas désiré ce changement ?chambre7-1

Comme j'aurais aimé être ces autres yeux qui allaient sans nul doute se poser sur son corps.

Il en avait été ainsi lorsque je lui avais offert sa petite robe blanche, elle l'avait trouvée magnifique mais avait renoncé à l'acquérir en arguant du fait que jamais elle n'oserait la porter.

À son anniversaire, lorsqu'elle la sortit de son paquet, elle m'embrassa me remerciant de lui forcer la main.

Puis elle la porta souvent, très souvent, il faut dire qu'elle lui allait à ravir, mettant son corps en valeur, de sa poitrine à sa taille de guêpe.

Je me souviens encore d'un après-midi où nous étions allés en ville faire des achats, j'avais oublié la carte bancaire dans la voiture, Monika sans moi avançait vers la zone marchande, elle était à une vingtaine de mètres, encore un jeune couple à doubler pour la retrouver lorsque j'entendis la femme dire à son mari :

- Pas la peine de te demander ce que tu regardes !

Celui-ci lui répondit :

- Je ne vais tout de même pas cracher sur ce qui est joli, elle a un beau cul non ?

- C'est vrai elle est craquante.

Quel délice pour moi de surprendre ces confidences !

chambre7-2J'en entendis d'autres et il m'arriva souvent de prendre du retard et la laisser ainsi en pâture aux regards et commentaires.

Monika s'épanouissait ces derniers jours comme jamais, le climat de mystère qui régnait entre nous au lieu de nous éloigner nous rapprochait.

Je n'avais jamais été aussi inspiré dans l'écriture de mes chapitres, le carnet qui ne me quittait plus fut vite complet.

L'écriture d'un livre illustré était-elle encore nécessaire, n'avions nous pas retrouvé le cap dont la routine du quotidien nous avait éloignés ?

Mes récoltes en salle de bain étaient de plus en plus fructueuses.

Enfin notre vie prenait un tour nouveau !

Elle m'avoua elle-même dormir mieux, la deuxième nuit avant de la rejoindre dans le monde des songes je la vis arborer un sourire si beau si pur en plein sommeil.

Le reptile n'était plus à l'affiche de mes rêves même si la queue de Tabou était devenue sinueuse et d'une longueur inhabituelle pour un chat autour des jambes de Monika.

Monika dans sa robe blanche qu'elle allait faire glisser sans que je la voie tomber à ses chevilles. Le lendemain le rêve hoqueta sa trame à l'identique.

Ainsi passèrent les premiers jours, vite, si vite, trop vite.

Au troisième, l'orage qui couvait, s'abattit sur nous refroidissant l'atmosphère, adieu les audaces vestimentaires, ma plume elle aussi sembla frappée par la foudre, je n'ouvris que deux fois mon carnet, le lendemain je l'oubliai même dans le tiroir de mon bureau.

Je sortis sans grande gloire de la salle de bain totalement bredouille.

Hier soir, je me suis décidé à ouvrir la pochette cachée en haut de l'armoire histoire de retrouver l'inspiration. Avant de l'ouvrir j'en caressai la surface lisse pour m'imprégner de son contenu puis religieusement je sortis une à une les quelques photos.

Oui Monika était belle, cela ne faisait aucun doute Valentin savait y faire en bon artisan mais je ne retrouvais pas l'émotion première presque animale ressentie dans sa boutique.

Ce n'était pas cette Monika que j'avais cru apercevoir !

Ou était-ce l'émotion de me savoir observé par lui ?

Une à une, je les ai étalées sur la table basse du salon, elle était belle dans son insolente jeunesse.

Il me fallait vérifier ce qui n'avait peut-être été qu'une illusion. Avant le retour de Monika à une heure sans surprise, je rangeai la pochette dans le tiroir de mon bureau, prenant soin d'en dégager la surface pour mieux l'inviter à s'asseoir,

Elle me confia avoir déjà mangé, souffrir de migraine et avait tellement hâte de dormir qu'elle ne prit aucune douche.

Il me fallait agir au plus vite et m'en retourner auprès de Valentin.

Il était temps de recharger la pile en allant retirer les photos en attente et lui en confier de nouvelles.

J'allais cette fois franchir un seuil de non-retour avec des photos plus lascives, audacieuses même s'il était encore exclu que sa chair fût trop exposée.

Comment allais-je lui dire que bientôt, même s'il devait s'en douter,,,, ?

Au matin, je fermai la porte laissant Monika encore en sommeil, j'avais prévenu le bureau que je serais en retard, prétextant un rendez-vous médical.

À l'ouverture je devais le surprendre.

Tabou était devant la porte se frottant à moi et me suivit dans la boutique, Valentin parut soulagé de me voir, il faisait incroyablement chaud à l'intérieur pourtant jamais le soleil ne paraissait en mesure de l'atteindre.

Il me remit les deux pochettes qui m'attendaient et qui trouvèrent rapidement refuge dans ma sacoche, je lui tendis une enveloppe plus épaisse qu'à l'accoutumée et profitant de la présence de Tabou à mes pieds pour passer ma main dans sa douce fourrure je lui demandai sans lever les yeux si cela poserait problème si je lui confiais des travaux plus, comment dire, personnels ?

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Valentin # 7

chambre7-9J'ai passé plusieurs nuits consécutives dans l'antichambre des secrets, en tête-à-tête avec les représentations en trois dimensions de Monika, prisonnière de sa cage de verre. Comme à chaque fois, je me suis trouvé en présence de deux femmes dans un même corps. Il y avait d'un côté Monika la Gypsie, en robe indienne, multicolore et mystique, et puis Monika la Libertine, en robe blanche, si courte et frivole... Quand il m'a confié ces photos à retirer, Philippe m'a demandé si j'accepterais de travailler sur des clichés « plus personnels ». Voilà un adjectif qui cache mal son jeu. Si j'avais été d'humeur taquine, je lui aurais demandé de préciser ce qu'il entendait par « personnel », rien que pour le plaisir de le voir rougir, de l'entendre bafouiller, de lui donner les mains moites... Mais l'heure n'était pas à la plaisanterie. Il avait l'air si amoureux, si fragile, que je ne voulus pas l'effrayer davantage. Alors, je lui ai simplement répondu que j'étais un photographe professionnel et que par conséquent, je n'avais a priori aucune raison de refuser un travail quel qu'il soit...

- Je vais vous confier un secret, lui ai-je dit en étalant sur le comptoir les photos qu'il venait d'apporter. Il y a des images de vacances en famille au bord de la mer ou de réveillons de Noël qui sont plus vulgaires et obscènes qu'une photo de jeune femme nue, je veux dire vraiment nue...

Je crois qu'il est reparti rassuré et plus confiant en l'avenir. La prochaine fois qu'il viendra, il faudra que je lui explique pourquoi la présence de Tabou est importante.

Lorsque j'ai ouvert cette boutique, il y a de cela plus de trente ans, il arrivait souvent que des parents se présentent avec un bébé et me demandent d'en faire un portrait à l'ancienne, en noir et blanc, tout nu sur une peau de mouton. Face aux photos de Monika en petite robe blanche, prenant la pose sur un tapis flokatis de laine blanche, j'ai retrouvé l'émotion de ces travaux d'antan. Certes Monika n'était pas déshabillée, mais elle n'en était pas moins nue. Sa robe, ses sandales, ne servaient qu'à suggérer sa nudité. Le compas entrouvert de ses jambes traçait des angles lascifs, la délicatesse de ses genoux encore adolescents était une invitation pressante à la caresse d'une main aimante, une main qu'elle aurait laissé effleurer le galbe de ses mollets, enserrer ses chevilles lacées, et plus tard remonter entre ses cuisses qu'elle aurait docilement écartées...

Ce fut au cours de la seconde nuit, alors qu'elle était à quatre pattes sur le tapis de laine, cambrée comme une chatte en chaleur malgré - ou à cause de ? - sa petite robe blanche que nous avons commencé à nous parler.

- Je vous plais comme ça, Valentin ?

D'emblée, j'ai apprécié sur ses lèvres le voisinage du vous et de mon prénom.

- Oui, bien-sûr. Pour tout vous dire, je vous préfère dans cette petite robe qu'en jupe indienne. Le blanc vous va si bien ! Et puis, il aurait été dommage de cacher de si belles jambes !chambre7-8

- Philippe pense comme vous. Je le soupçonne même d'avoir pris plaisir à ce que je la porte en public et que les hommes me regardent avec du désir dans les yeux.. Vous bandez ?

- Un peu... mais je saurai rester sage...

Ce fut ainsi, elle à quatre pattes sur son tapis de laine, moi assis en érection dans mon fauteuil de velours rouge, que nous nous sommes parlé, comme deux êtres familiers. Sa voix enfermée dans sa cage de verre avait quelque chose de cristallin et d'exotique. Le plus étrange, c'était que si elle prenait une pose plus humaine, qu'elle se mettait debout ou simplement assise ou agenouillée, elle perdait tout aussitôt son don de la parole, comme si ce n'était qu'en posture féline d'attente de saillie jusqu'au bas des reins que lui venaient les mots.

 

 

Je n'ai pas gardé de souvenirs très précis de ce que l'on se disait . En effet, au bout de quelques minutes, je sombrais dans une sorte de sommeil comateux où se poursuivait notre conversation intime. Lorsque je me réveillais au petit matin, elle était toujours là en robe blanche, immobile mais muette, dans sa cage de verre. Je ne bandais plus et des larmes de sperme avaient séché sur mon ventre et empesé mes poils pubiens...

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Par michel koppera - Publié dans : chambre obscure - Communauté : Fantasmes et écriture
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