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Vendredi 6 janvier 2023 5 06 /01 /Jan /2023 08:00

Philip ROTH, "Indignation", roman paru aux USA en 2008, et en France aux éditions Gallimard en 2010, dans la collection "Du monde entier" (196 pages). Traduction de l'anglais par Marie-Claire Pasquier

1951. Marcus Messmer, âgé de 19 ans, pousuit ses études universitaires dans l'Ohio, loin du New-Jersey où habite sa famille pour échapper à l'emprise de son père. Alors que plane la menace de l'enrôlement pour la guerre de Corée, Marcus va découvrir la liberté et l'amour.

Extrait pages 54-55. Marcus a invité Olivia (une copine d'université) au restaurant. Pour l'occasion, Elwyn, son colocataire de chambre universitaire, lui a prêté sa voiture, une Tourin Sedan La-Salle noire datant de 1940.

" Après le dîner, on est repartis en voiture et je suis allé me garer, en dehors du campus, à la sortie de la ville, sur la route qui longeait le cimetière minicipal. Il était déjà un peu plus de huit heures et il me restait moins d'une heure pour la ramener à sa résidence afin qu'elle soit rentrée avant que les portes ne soient verrouillées pour la nuit. Je ne voyais pas d'autre endroit où me garer, même si j'avais peur que la voiture de police qui patrouillait dans l'allée derrière l'auberge ne s'arrête derrière la voiture d'Elwyn, tous phares allumés, et que l'un des flics ne sorte de la voiture pour venir brandir une lampe-torche à l'intérieur et demander à Olivia : " Tout va bien, mademoiselle ? " C'est ce que disaient les flics quand ils faisaient ça, et à Winesburg, ils le faisaient tout le temps.

Mon principal souci était donc les flics, et l'heure tardive - huit heures dix - quand je coupai le contact de la La-Salle et me tournai pour l'embrasser. Sans opposer de résistance, elle me rendit mon baiser. Je m'exhortai intérieurement : " Ne t'expose pas à un refus, arrête-toi là." Mais cet avis était stupide, ce que confirma mon érection. Je glissai doucement ma main sous sa veste et déboutonnai son chemisier, et j'avançai mes doigts jusqu'à son soutien-gorge. En réaction à la caresse à travers le tissu du bonnet, elle ouvrit plus grand la bouche et continua à m'embrasser, avec cette fois la titillation supplémentaire procurée par l'activité de sa langue. J'étais seul dans une voiture sur une route non éclairée avec ma main qui explorait l'intérieur du chemisier d'une fille et sa langue à elle qui explorait l'intérieur de ma bouche, cette même langue qui habitait toute seule le fond obscur de sa bouche et qui semblait maintenant le moins chaste des organes. Jusqu'à cet instant, je n'avais jamais connu la présence d'une autre langue que la mienne dans ma bouche. Rien que cela faillit me faire décharger. Pas besoin d'autre stimulant. Mais la rapidité avec laquelle elle m'avait permis de progresser -  et cette langue qui jaillissait , épongeait, glissait, léchait les dents, cette langue qui est comme le corps dépouillé de la peau - m'incita à entreprendre de déplacer délicatement sa main jusqu'à l'entrejambe de mon pantalon. Là non plus, je ne rencontrai pas de résistance. Victoire sans combat."

En illustration, la photo de la jaquette du roman

roth indignation

Par michel koppera - Publié dans : lectures x - Communauté : Fantasmes et écriture
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Mardi 13 décembre 2022 2 13 /12 /Déc /2022 08:00

Lucía Etxebarría, "Beatriz et les corps célestes", roman paru en 1998 (titre original "Beatriz y los corpos celestes", texte traduit de l'espagnol par Alexandra Carrasco ). Edité en France en 2001 chez Denoël, disponible en collection 10/18, domaine étranger n° 3401, 317 pages.

Rappel : j'ai déjà consacré des articles à des précédents livres de Lucia Etxebarria 

Lucia ETXEBARRIA, "Un miracle en équilibre"

Lucia Etxeberria, "De l'amour et autres mensonges"

Un magnifique roman où la jeune Beatriz, la narratrice, erre entre Madrid et Edimbourg, à la recherche de sa liberté de femme et de son identité sexuelle. Au fil des chapitres, au rythme effréné des soirées défonce (coke, héroïne, ecstasy, alcool et médocs...) on l'accompagne dans ses rencontres et ses amours... Il y a Mónica, le grand amour d'enfance, puis Caitlin, sa colocataire écossaise, et Ralph, son premier amant... ...

Extrait page 175-176 : Madrid. Beatriz et Mónica se sont enfermées dans les toilettes d'une boîte de nuit pour sniffer une ligne de coke

" Le cabinet était très exigu et cela nous obligeait à rester tout près l'une de l'autre, nous touchant presque. J'étais plus grande que Mónica, mais ce soir-là nos regards étaient à la même hauteur car elle portait des sandales à semelles compensées.

− Tu  sais quoi, Betty ? T'es belle, avec ces mèches. Ça m'étonne pas que Chano ait flashé sur toi..., me dit-elle tout en prenant une de mes mèches blanches et en l'enroulant autour de ses doigts. Puis elle rapprocha mon visage du sien en tirant sur la mèche, au point que nos nez se touchèrent et que nos bouches se trouvèrent à quelques millimètres l'une de l'autre. À cette distance, j'avais l'impression que Mónica avait quatre yeux, quatre billes noires au centre desquelles trônait une petite ampoule qui les éclairait. Je restai immobile, elle pencha légèrement la tête pour que nos lèvres s'effleurent mais elle me laissa la responsabilité du geste décisif. Je pinçai les lèvres et l'embrassai. Ce fut un baiser très chaste, en vérité, un léger contact des lèvres. Alors elle m'embrassa encore, cette  fois en caressant ma lèvre inférieure avec sa langue. Je reculai et m'appuyai sur le lavabo, puis je restai là à attendre, les yeux grand ouverts. Elle s'approcha à nouveau de moi et je sentis ses lèvres charnues, chaudes et dures contre les miennes. Un frisson me parcourut et je m'appuyai un peu plus fermement pour la stopper. Mon cœur était si heureux que j'avais l'impression qu'il ne m'appartenait plus. Mes lèvres s'ouvrirent doucement comme une fleur saluant l'aube. Elle s'activa et sa langue aussi. Elle devint pressante, habile. Trop habile. Je me défis de son étreinte, haletante.

− Que va penser Coco (le compagnon de Mónica) ? articulai-je en un murmure héroïque. Dans mon esprit, Coco était le seul obstacle qui nous empêchait de céder à l'inéluctable.

Pour toute réponse, elle me saisit au cou et me ramena contre elle. Si incroyable que cela paraisse, je n'avais jamais embrassé sur la bouche. Elle le savait, j'en suis certaine. J'ignore si elle savait aussi que je l'avais embrassée de nombreuses fois dans mes rêves. Je ne sais si elle jouait avec moi, si elle s'amusait comme le chat qui feint de relâcher la souris juste avant de l'achever. Je ne sais si elle était cruelle ou simplement inconsciente. Je ne sais pas, je ne sais pas... Aujourd'hui, je n'ai toujours pas la réponse." 

beatriz


Par michel koppera - Publié dans : lectures x - Communauté : Fantasmes et écriture
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Mardi 29 novembre 2022 2 29 /11 /Nov /2022 08:00

"Rencontres ferroviaires" est un recueil de 6 nouvelles érotiques paru en 1999 aux éditions Fayard. Disponible dans la collection Livre de poche n° 15060 (121 pages)

Les 6 nouvelles correspondent aux 6 gares parisiennes, points de départ des récits de voyage. 

Extrait de la nouvelle " Gare Saint-Lazare ou le Galet de Dieppe"(17 pages) La passagère effectue le trajet Paris-Dieppe ( les deux illustrations qui accompagnent cet extrait ne correspondent pas littéralement au texte mais en ont l'esprit ferroviaire )

" Envie d'une cigarette. Elle se dirige vers le compartiment "fumeurs". Au fond, un jeune homme noir dort, lové sur lui-même. Ailleurs, un barbu pianote sur son ordinateur, un cigarillo éteint entre les lèvres. Elle ôte ses chaussures, allonge les jambes sur le siège qui lui fait face, et allume sa cigarette. Elle fume, les yeux clos, bercée par le brimbalement du train. Sa cigarette à demi consumée, elle l'écrase dans le cendrier de l'accoudoir. Puis referme les yeux. Peu à peu, une douce et chaude torpeur l'envahit.

Quelqu'un a dû s'asseoir auprès d'elle : émane de l'inconnu un parfum sucré qui lui rappelle l'odeur des marchés africains qu'elle a connus dans son enfance. Elle soupire.

– Vous permettez ?

Elle entrouve les yeux pour voir le barbu à l'ordinateur s'installer en face d'elle. Quand elle va pour retirer ses pieds, il les retient d'une main brûlante et les place entre ses jambes écartées.

– Cela ne me gêne pas du tout.

Moi non plus, pense-t-elle tout en remarquant que son vis-à-vis porte un pantalon de velours côtelé bleu marine. 

deforges train 2

À nouveau, elle ferme les yeux. Le parfum sucré se fait plus présent. Un souffle tiède caresse son cou, des lèvres épaisses se posent sur sa peau, l'aspirent. Une main glisse sous son pull, s'empare de son sein, le presse, pince le mamelon, l'étire. Les doigts tordent la pointe érigée... ses hanches ondulent. Elle gémit. L'homme se saisit de l'autre sein qui, à son tour, durcit sous la caresse.

En face, le barbu déplace ses pieds, les pose sur la protubérance qui tend son pantalon ; leurs plantes épousent d'emblée la forme de son sexe. L'homme leur imprime un mouvement de va-et-vient.

Le Noir a maintenant soulevé le pull et happe avec sa bouche les mamelons durcis, douloureux, qu'il mordille de plus en plus fort. D'une main, il écarte la culotte mouillée et se glisse dans la fente ouverte. Elle retient un cri, se cambre. Il accélère le mouvement, sans lâcher la pointe du sein dans laquelle ses dents s'incrustent. De douleur et de plaisir, elle geint. Ses jambes s'écartent. Le barbu a sorti un long sexe qu'il actionne tout en fixant la main noire qui s'affaire entre les cuisses blanches. Un long jet de sperme les atteint à l'instant précis où elle-même jouit dans un long râle.

Quelques instants plus tard, cependant qu'elle regagne sa place après avoir remis un peu d'ordre dans sa tenue, elle constate que les deux hommes ont quitté le compartiment.

Le train entre en gare de Dieppe."

deforges train

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Vendredi 18 novembre 2022 5 18 /11 /Nov /2022 08:00

Petit recueil de 8 nouvelles érotiques (127 pages) de la Collection Charme du magazine féminin Nous Deux, paru en 2021. Les récits sont un mélange de littérature de gare et de romans à l'eau de rose dans le genre collection Harlequin. 

Je vous ai néanmoins déniché un  court extrait de la nouvelle "La fièvre de l'amour" d'une certaine Peggy Rumey.

Pages 85-86 : confession de Pauline

" J'étais au téléphone avec Mathieu. on venait de se rabibocher. On se dispute beaucoup ces derniers mois. Notre complicité d'autrefois a disparu. Je suis à un moment de ma vie où je me pose des questions sur mes envies. Les enfants grandissent. Ils sont encore petits mais je n'ai plus de bébé à la maison. Je déprime, en fait. Julie, elle, semble épanouie. Elle a un travail, ce que je n'ai jamais eu. J'aide parfois à tenir la caisse dans la chocolaterie d'une amie. Surtout à Pâques et à Noël, pour les extras. C'est plus pour dépanner que pour travailler. Mathieu n'aime pas me savoir derrière le comptoir. Il ne le reconnaîtra pas, mais il est excessivement jaloux. Jaloux ! Malgré l'attention qu'il me porte chaque jour, il n'a plus de désir pour moi depuis des mois. Il est fatigué, ce n'est jamais le bon moment. Autrefois, nous avions une vie sexuelle épanouie. Mathieu m'a même initiée à quelques pratiques dont je n'aurais jamais eu l'idée avant de le rencontrer. Mon corps était comme en friche. Alors parfois, seule, chez moi, je me rends sur Internet et je consulte des sites pornographiques. Je ne sais plus comment ça a commencé, mais j'aime de plus en plus me caresser sous la douche ou même parfois dans le salon, avec la peur que quelqu'un survienne. La peur ou l'envie, je ne sais pas. Je peux me caresser ainsi plusieurs fois par jour, en regardant des vidéos. C'était justement l'objet de notre dispute ce matin-là. Mathieu m'avait surprise, la nuit précédente, dans le salon, en train de me caresser devant une vidéo.

– Mais qu'est-ce que tu fais ? m'a-t-il demandé.

J'ai pensé que ça pourrait l'exciter. Au contraire, il s'est tout de suite énervé.

 – Mais tu es une perverse !"

watching porn

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Vendredi 28 octobre 2022 5 28 /10 /Oct /2022 08:00

Louis-Ferdinand Céline : "Guerre" (184 pages), texte inédit paru en 2022 aux Editions Gallimard

Le manuscrit original qui date de 1934 avait été perdu. Il constitue l'ébauche d'un roman qui ne vit jamais le jour. Comme son titre l'indique, toute l'action de ce premier volume des inédits de Céline se déroule lors de la Première guerre mondiale, à l'arrière du front, dans les Flandres, dans la ville imaginaire de Peurdu-sur-la-Lys, là où cohabitent les blessés en convalescence, les troupes en permission et toute une faune d'aigrefins, de professionnelles du sexe et de profiteurs de guerre.

Je vous recommande la lecture de cet ouvrage, où on retrouve l'incroyable talent littéraire d'un Céline pas encore perverti pas l'antisémitsme et le racisme. 

Ferdinand, le narrateur, s'est lié d'amitié avec un certain Cascade, tire-au-flanc qui est aussi le mac d'Angèle, jeune femme de petite vertu. Voici deux extraits où apparaît le personnage d'Angèle:

pages 87-88 : premier portrait

"La voilà donc ici débarquée son Angèle sans avertir un matin dans la salle Saint-Gonzef. Il (Cascade) m'avait pas menti, elle était bandatoire de naissance. Elle vous portait le feu dans la bite au premier regard, au premier geste. (...) 

– Tu vois Ferdinand je t'ai pas menti, quand elle partira tu regarderas ses fesses, en partant pour chez les troufions elle provoquera des mutineries, je te l'ai bien dit, elle brûle... Va ma gosse. Tu vas chercher les arcardes... le café de l'Hyperbole. Tu demanderas Destinée la boniche, je l'ai prévenue. Tu vas demeurer chez elle... (...)

Moi j'en revenais pas pour l'Angèle, gâteux et tout comme j'étais. J'y aurais sucé le dedans des cuisses. j'aurais payé n'importe quoi si j'avais eu des fonds. Il m'observait Cascade. Il se marrait.

– T'échauffe pas Loulou. Si t'es un pote quand tu rebanderas je te la ferai tringler la mignonne et je veux qu'elle reluise, émue comme pour un officier. Tu vois que je peux pas faire davantage...

C'était la mode des petits corsages bien minces pour l'été. je pensais au sien, ça me faisait devant les yeux comme un voile de rêve avec les pointes des nichons..."

Page 135 : Angèle et Destinée. Les deux jeunes femmes femmes partagent la même chambre au-dessus du café où Destinée est serveuse

celine-guerre

" Elle continuait à demeurer dans la même chambre au-dessus du café avec Angèle puisque c'était arrangé comme ça. Et puis d'abord elle était bien fatiguée Destinée parce qu'elle servait de tous les alcools et des apéritifs par citernes, à elle toute seule entre les trente-cinq tables à l'Hyperbole, jusqu'à dix heures du soir depuis six heures quinze du matin qu'était l'heure réglementaire. Encore Angèle qu'était pas croyable comme pernicieuse, je l'ai su plus tard, elle trouvait moyen de la sucer quand elle rentrait chez elle et la faisait jouir des deux trois fois. Et plus que Destinée était fatiguée de servir et plus ça l'excitait Angèle de la faire reluire, et le plus difficilement, plus ça lui semblait bon. Les gens sont enragés. "

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Vendredi 14 octobre 2022 5 14 /10 /Oct /2022 08:00

"Le Tailleur de pierre", roman policier de Camilla Läckberg paru en 2005, édité en France aux Editions Acte Sud en 2009 (traduction du suédois par Lena Grumbach et Catherine Marcus). Disponible dans la collection poche Babel Noir  n° 92 (593 pages)

 extrait 1. pages 327-328 : Tombée dans la misère et pour subvenir aux besoins de ses enfants, Agnès n'hésîte pas à se prostituer. Le chapitre se passe en 1928

"Agnès se pencha en arrière face au soleil. Il ne fallait pas qu'elle reste trop longtemps à profiter des rayons su soleil qui chauffait son visage, si elle voulait conserver la peau blanche d'une femme de classe supérieure. C'était la seule chose qui lui restait de sa vie antérieure, son physique, et elle ne se privait pas d'en tirer profit pour redorer son existence autrement si morne. C'était surprenant combien de marchandises on pouvait obtenir chez l'épicier en se prêtant à une étreinte, voire plus à condition que le gain soit en rapport. De cette manière elle avait pu se procurer des friandises et de la nourriture qu'elle ne partageait pas avec sa famille. Elle avait même obtenu un bout de tissu qu'elle avait soigneusement dissimulé à Anders (son mari qu'elle n'aime pas). Pour l'instant elle se contentait d'aller le tâter de temps en temps, et de le passer sur sa joue pour sentir la douceur de la soie. Le boucher aussi avait glissé quelques insinuations, mais il y avait des limites à ce qu'elle était prête à payer pour quelques morceaux de viande supplémentaires. L'épicier était un homme relativement jeune et bien de sa personne, avec qui ce n'était pas du tout désagréable d'échanger des baisers dans l'arrière-boutique, tandis que le boucher était un homme gros et gras dans la soixantaine et il faudrait bien plus à Agnès qu'un rôti de bœuf  pour permettre à ses doigts boudinés aux ongles inscrustés de sang séché de se faufiler sous ses jupes."

extrait 2. page 465. La scène se déroule en 1954

Agnès était en train de se préparer devant sa coiffeuse. À l'insu d'Äke (son second époux) elle avait depuis six mois une aventure passionnée avec l'un de ses plus proches amis,. Elle arrangea ses cheveux noirs en un chignon et tamponna un peu de parfum derrière les oreilles, aux poignets et dans le sillon entre ses seins. Elle portait la lingerie en soie noire avec des dentelles qui révélait qu'elle avait encore une silhouette qui ferait pâlir de jalousie plus d'une jeune fille.

lackberg

Elle se réjouissait du rendez-vous, comme les autres fois à l'hôtel Eggers. Per-Erik était un vrai homme, contrairement à Äke. À la grande satisfaction d'Agnès, il parlait de plus en plus de se séparer de sa femme. Elle n'était pas naïve  au point de croire inconditionnellement à ce genre d'affirmations vernant d'hommes mariés, mais elle savait qu'il appréciait énormément ce qu'elle lui offrait au lit, et sa petite femme boulotte ne valait pas grand-chose à côté d'elle."

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Mardi 20 septembre 2022 2 20 /09 /Sep /2022 08:00

"Désert" est paru en 1980 aux Éditions Gallimard. On le trouve en collection Folio1670 (439 pages).

Le Clézio retrace l'enfance, l'adolescence et l'entrée dans la vie d'adulte de Lalla, orpheline du grand désert du Sahara. À l'adolescence, élévée par sa tante, elle s'enfuit pour échapper à un mariage forcé, traverse la Méditerranée et échoue à Marseille.

Extrait page 313 et suivantes. Lalla, employée comme "femme de ménage" dans un hôtel borgne, observe la rue et ses passants. Le Clézio nous livre ici une description sans complaisance de la prostitution "bon marché " et de la misère sexuelle qui la génère.

"...Sur le trottoir, en face de Lalla, une femme est immobile. C'est elle que les hommes regardent sans bouger, en fumant des cigarettes. C'est une femme très petite, presque une naine, au corps large, à la tête enflée posée sur ses épaules, sans cou. Mais son visage est enfantin, avec une toute petite bouche couleur cerise, et des yeux très noirs entourés d'un cerne vert. Ce qui étonne le plus en elle, après sa petite taille, ce sont ses cheveux courts, bouclés, ils sont d'un rouge de cuivre qui étincelle bizarrement à la lumière du couloir derrière elle, et font comme une auréole de flamme sur sa tête de poupée grasse, comme une apparition surnaturelle.

Lalla regarde les cheveux de la petite femme, fascinée, sans bouger, presque sans respirer. Le vent froid souffle avec violence autour d'elle, mais la petite femme reste debout devant l'entrée de l'immeuble, avec ses cheveux qui flamboient sur sa tête. Elle est habillée d'une jupe noire très courte qui montre ses cuisses grasses et blanches, et d'une sorte de pull-over violet décolleté. Elle est chaussée d'escarpins vernis à talons aiguilles très hauts. À cause du froid, elle fait quelques pas sur la place, et le bruit de ses talons résonne dans le vide de la ruelle.

Des hommes s'approchent d'elle, maintenant, en fumant leurs cigarettes. Ce sont des Arabes pour la plupart, aux cheveux très noirs, avec un teint gris que Lalla ne connaît pas, comme s'ils vivaient sous la terre et ne sortaient que la nuit. Ils ne parlent pas. Ils ont l'air brutal, buté, lèvres serrées, regard dur. La petite femme aux cheveux de feu ne les regarde même pas. Elle allume une cigarette à son tour, et elle fume vite, en pivotant sur place. Quand elle tourne le dos, elle semble bossue.

desert leclezio

Plus en haut de la ruelle marche une autre femme. Celle-ci est très grande, au contraire, et très forte, dejà vieillie, flétrie par la fatigue et le manque de sommeil. Elle est vêtue d'un grand imperméable en toile cirée bleue, et ses cheveux noirs sont décoiffés par le vent.

Elle descend lentement la rue, en faisant claquer ses chaussures à hauts talons, elle arrive à côté de la naine, et elle s'arrête, elle aussi devant la porte. Les Arabes s'approchent d'elle, lui parlent. Mais Lalla n'entend pas ce qu'ils disent. L'un après l'autre, il s'éloignent, et s'arrêtent à distance, les yeux fixés sur les deux femmes immobiles qui fument. Le vent passe par rafales le long de la ruelle, plaque les vêtements sur le corps des femmes, agite leurs cheveux. Il y a tant de haine et de désespoir dans cette ruelle, comme si elle descendait sans fin à travers tous les degrés de l'enfer, sans jamais rencontrer de fond, sans jamais s'arrêter. Il y a tant de faim, de désir inassouvi, de violence. Les hommes silencieux regardent, immobiles au bord du trottoir comme des soldats de plomb, leurs yeux fixés sur le ventre des femmes, sur leurs seins, sur la courbe de leurs hanches, sur la chair pâle de leur gorge, sur leurs jambes nues. Peut-être qu'il n'y a pas d'amour, nulle part, pas de pitié, pas de douceur. Peut-être que la taie blanche qui sépare la terre du ciel a étouffé les hommes, a arrêté les palpitations de leur cœur, a fait mourir tous leurs souvenirs, tous leurs désirs anciens, toute la beauté ?

Lalla sent le vertige continu du vide qui entre en elle, comme si le vent qui passait dans la ruelle était celui d'un long mouvement giratoire. Le vent va peut-être arracher le toit de maisons sordides, défoncer portes et fenêtres, abattre les murs pourris, renverser en tas de ferraille toutes les voitures ? Cela doit arriver, car il y a trop de haine, trop de souffrance... Mais le grand immeuble sale reste debout, écrasant les hommes de toute sa hauteur. Ce sont les géants immobiles, aux yeux sanglants, aux yeux cruels, les géants dévoreurs d'hommes et de femmes. Dans leurs entrailles, les jeunes femmes sont renversées sur les vieux matelas tachés, et possédées en quelques secondes par les hommes silencieux dont le sexe brûle comme un tison. Puis ils se rhabillent et s'en vont, et leur cigarette posée sur le bord de la table n'a pas eu le temps de s'éteindre. Dans l'intérieur des géants dévoreurs, les vieilles femmes sont couchées sous le poids des hommes qui les écrasent, qui salissent leurs chairs jaunes. Alors, dans tous ces ventres de femmes naît le vide, le vide intense et glacé qui s'échappe d'elles et qui souffle comme un vent le long des rues et des ruelles, en lançant ses tourbillons sans fin."

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Vendredi 9 septembre 2022 5 09 /09 /Sep /2022 08:00

C'est dans la bibliothèque familiale, que j'ai découvert "Rebecca", roman de Daphné du Maurier paru au Royaume-Uni en 1938. En France, c'est chez Albin Michel qu'il fut édité dans une traduction de l'anglais réalisée par Denise Van Moppes (379 pages).  Le tirage que j'ai lu date de 1960.

Extrait chapitre VII, page 92 : Le roman est très pudique, même lorsqu'il évoque la vie sexuelle dissolue de Rebecca. Cependant, voici ce qu'écrit la narratrice, récemment arrivée à Manderley quand elle se trouve en présence de Madame Danvers, la gouvernante du manoir qui se propose de lui faire visiter les lieux :

" Son ton évoquait pour moi une visite chez des amis quand j'étais enfant, et où la petite fille de la maison, un peu plus âgée que moi, m'avait prise par le bras en me chuchotant à l'oreille :" Je connais un livre enfermé dans le placard de ma mère. Veux-tu que nous allions le regarder ? " Je me rappelai son visage pâle et animé, ses petits yeux brillants et la façon dont elle me pinçait le bras."

Plus loin dans le roman, il sera une seconde fois fait allusion aux lectures interdites aux jeunes filles. Notez que la gamine ne propose pas de "lire" le livre mais de le "regarder", ce qui laisse entendre qu'il contient des images érotiques voire pornographiques. Ci-dessous, illustration de Gerda Wegener (1886-1940)

rebecca du maurier


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Lundi 4 juillet 2022 1 04 /07 /Juil /2022 08:00

Pola Oloixarac est une jeune écrivaine argentine. Son roman "Mona" (169 pages) est paru en 2019 aux Editions Penguin. Traduit en français par Isabelle GUGNON, il a été édité en France aux Editions du Seuil en février 2022.

Le thème : Mona, une écrivaine péruvienne installée en Californie, doit participer en Suède à un grand colloque qui réunit des auteurs mondialement connus, colloque à l'issue duquel sera décerné un prestigieux prix littéraire. Le roman de Mona fait partie des ouvrages nominés en vue de l'attribution de ce prix.  Ce colloque qui se déroule au bord d'un lac est l'occasion  de rencontres multiples.

Extrait pages 106-108 : Mona retrouve Marco Guncio un écrivain colombien plutôt séduisant. Elle se souvient d'une précédente soirée avec lui, à Carthagène, quelques années auparavant.

" (Mona) prit la fuite en taxi avec Marco dans la  nuit colombienne, ils traversèrent les rues sombres qui entourent le musée à l'air libre qu'est la vieille ville de Carthagène. Une abominable chanson de Ricardo Arjona les fit rire aux éclats. Ils s'embrassèrent furtivement et, entre deux fous rires, il lui fourra sa langue dans la bouche jusqu'à la glotte. Mona riposta en toussant, puis abandonna toute réticence et se laissa dévorer les lèvres.

Ils se rendirent à l'hôtel Santa Clara, où ils avaient chacun une chambre. En traversant le hall, elle se félicita d'avoir mis son imperméable, dont elle releva le col pour cacher son visage quand ils passèrent à côté du prix Goncourt qui sirotait un verre, le regard perdu, soûl comme une barrique. Elle l'avait embrassé la veille au soir dans la piscine. Une fois dans la chambre coloniale, Marco avala un grande lampée de whisky et s'attaqua à son sancta sanctorum, qu'il appela son "sushi", en y passant une langue baveuse comme une limace traînante, quasiment immobile, promenant ses antennes aux extrémités pourvues d'yeux sur sa labia mojora. Une limace sur une autre limace.

Sa démonstration de danse ayant laissé augurer davantage d'enthousiasme, Moma lui enfonça la tête dans ses organes internes pour le lui rappeler. Il s'écarta lentement et murmura :

Niña, tu me plais tellement que j'ai envie de garder ton odeur sur ma peau.

Au loin s'élevaient les percussions d'une autre chanson de Ricardo Arjona. Les lèvres de Marco s'ouvrirent complètement, sans doute sous l'effet de l'âpreté du whisky et le contact de la douceur du sushi, et il repartit à l'assaut pour entreprendre de l'engloutir la bouche béante, comme s'il avalait de la guimauve, ses lèvres plaquées contre elle tandis que sa langue épaisse la pénétrait. Il posa ses mains en coupe sous ses seins, des pêches aux tétons durcis qu'il lécha. Mona notait mentalement tous ces détails en excluant Marco de la scène. Sans vêtements ni accessoires, son corps jaune et pâle paraissait enfantin dans son slip Calvin Klein, mais quelque chose l'attirait dans la répulsion qu'il lui inspirait. Elle s'imaginait détachée de son corps, semblable à une fleur écrasée par une brute qui en faisait ressortir l'éclat. Elle s'aperçut alors que Marco susurrait, parlait seul ou s'adressait à sa chatte. Elle n'entendait pas ce qu'il disait, contrairement à sa chatte, merveilleusement sensible à ses murmures. Elle eut bientôt un orgasme presque malgré elle, poussa un long soupir et observa Marco, qui s'adressait toujours à sa vulve. Elle en profita pour feindre l'endormissement ou l'évanouissement, un adorable subterfuge, utilisé disait-on par Isabel Preysler ¹, qui affriolait ainsi les hommes qu'elle désirait capturer. La première fois qu'elle couchait avec eux, Isabel tombait en pâmoison au beau milieu de l'acte, frappée d'une petite mort. Ils devenaient fous et ce truc de boudoir lui avait assuré la conquête absolue de Mario Vargas Llosa, l'auteur de L'Orgie perpétuelle."

¹ Isabel Preysler est née aux Philippines en 1951. À l'âge de 16 ans, elle s'installe en Espagne où elle a mené une carrière de mannequin. Elle fut entre autres l'épouse de Julio Iglesias 

oloixarac mona

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Vendredi 24 juin 2022 5 24 /06 /Juin /2022 08:00

"Regardez-nous danser" est le deuxième volet de la saga de Leila Slimani  "Le pays des autres".  Il couvre la période 1968-1974 au Maroc, période d'essor économique, d'ouverture au monde occidental mais aussi de répression féroce du régime d'Hassan II. Le roman de 365 pages est paru chez Gallimard (nrf) en 2022

Extrait pages 101-104 : À Fez, Selim qui a 18 ans rend visite à sa tante Selma, de six ans son aînée, malheureuse en ménage. 

" Selim sonna à la porte de l'appartement en début d'après-midi. Selma lui ouvrit. Elle portait un kimono de soie turquoise dont elle n'arrêtait pas de resserrer la ceinture comme si elle craignait que le vêtement ne glisse de ses épaules et qu'elle se retrouve nue. (Dans la cuisine, sa tante lui offre un café ) Selim, pour la première fois de sa vie, fit preuve d'impulsivité. Il saisit la main de sa tante et la garda dans la sienne. Il pouvait sentir sur sa peau le picotement des miettes. Il aurait voulu, peut-être, que ce geste soit seulement un signe de tendresse, de compassion, une preuve de la complicité qui les liait depuis des années. Mais il sut, dès qu'elle leva les yeux vers lui, qu'il ne s'agissait pas de cela. Il ressentait, en serrant sa main dans la sienne, en la regardant, la même excitation que quand il tenait le revolver contre lui, seul dans sa chambre. Son sexe durcit et il eut honte pour lui-même et pour tous les hommes. Les femmes avaient-elles de la chance ou bien étaient-elles maudites de pouvoir garder leurs désirs invisibles ?

Plus tard, il devrait revisiter, jusqu'à les user, jusqu'à les faire disparaître, jusqu'à ne plus savoir, les souvenirs de cet après-midi-là. Il l'attira vers lui ou c'est elle, peut-être, qui se leva et posa la joue contre la sienne. Elle approcha ses lèvres et lorsqu'il sentit dans sa bouche sa langue, fraîche et humide, il crut qu'il pourrait défaillir et la dévorer tout entière. Il n'eut pas peur. Il s'abandonna à elle comme il s'abandonnait à l'eau et éprouva un sentiment d'évidence et de légéreté. Il glissa sa main sous le kimono vert et, dans sa paume, enserra les petits seins aux tétons durcis, caressa la peau, tiède et douce, du ventre de Selma. Il fixa ses yeux fiévreux, embués, ses yeux qui disaient son désir d'êre transpercée et il se dit qu'elle n'avait jamais été aussi belle qu'à cet instant. Elle n'avait pas lâché sa main et l'attira dans le couloir puis dans la chambre dont elle ferma la porte. Pensa-t-elle à la possibilité que Mourad (son mari) revienne ou à l'heure de la sortie de l'école et au retour de Sabah (sa fille) ? Elle ne sembla pas s'en inquiéter. Elle s'allongea et fit glisser la ceinture de son kimono. Sa peau avait la couleur de la pâte de cannabis que les ouvriers effritaient entre leurs doigts. Sans rien dire, elle regarda Selim se déshabiller. Ses gestes étaient calmes, presque enfantins, comme si cétait la première fois qu'il retirait tout seul ses vêtements. Elle pouvait voir, sous le caleçon du jeune homme, la forme de son sexe en érection. Dehors, l'appel à la prière retentit.

Ce jour-là, il sembla à Selim que c'était elle qui le pénétrait. Elle entra en lui. Elle le déplia comme se déplient les doigts d'une main. Le corps de Selma était frêle, onctueux comme un nuage, et elle l'enveloppait d'une douceur qui le combla. Cette femme lui était destinée. Son corps avait été taillé pour se fondre dans le sien et il aurait voulu disparaître dans ses creux et s'y cacher de tous les malheurs du monde. Il n'avait pas de mots pour ça, pas d'explications pour le bonheur intense qui l'envahissait, pour cette rage heureuse qui lui faisait pousser de petits gémissements. Elle l'apprivoisait et il se voulait docile. Aucune parole ne fut prononcée et ils s'aimèrent, bercés par un silence grave et tranquille."

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Par michel koppera - Publié dans : lectures x - Communauté : Fantasmes et écriture
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